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Découvrez un folio qui bouleverse
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Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée...
Anonyme
- Folio
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- 13 Janvier 1983
- 9782070374434
Témoignages recueillis par Kai Hermann et Horst Rieck
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«De là où je vous parle, ce pays ressemble à une poussière incandescente et je sais qu'il suffira d'un rien pour qu'il s'embrase.» Sur l'île française de Mayotte dans l'océan Indien, les enfants errent, sans foi ni loi. Moïse a été recueilli à la naissance par Marie, une infirmière, qui le couve comme un cadeau inespéré. Mais à l'adolescence, le garçon se lie avec Bruce, chef de gang animé par la rage, qui l'embarque dans l'enfer des rues. Dans ce pays magnifique et au bord du chaos, cinq destins vont se croiser et révéler la violence de leur quotidien.
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Trois mois avant sa retraite, le père du narrateur fait une chute mortelle dans la forêt jurassienne. Son corps est découvert quelques jours plus tard au pied d'une falaise. Que s'est-il passé ? Est-il mort sur le coup ? S'agit-il vraiment d'un accident ? Ces questions obsèdent le narrateur. En quête de réponses, il se rend sur place et s'installe dans l'appartement de son père où il n'était jamais resté plus que le temps d'un dîner. Pierric Bailly tente alors de reconstituer le passé de ce père ouvrier, issu des idéaux soixante-huitards, très engagé dans la vie associative et politique. Dans le petit appartement HLM sont entassés quantité d'objets : carnets, souvenirs du passé, créations personnelles, dessins. Bailly découvre le quotidien d'un homme humble qui vivait en suivant ses passions sans se laisser influencer par l'extérieur.
Célibataire depuis 30 ans, il s'était créé un monde riche de théâtre, de musique, d'anglais, d'arabe, de japonais, de romans, de poésie, de yoga.
L'homme des bois n'est pas seulement le récit par son fils de la mort brutale et mystérieuse d'un père. C'est aussi une évocation de la vie dans les campagnes françaises de notre époque. C'est l'histoire d'une émancipation, d'un destin modeste, intègre et singulier. C'est enfin le portrait, en creux, d'une génération, celle des parents du narrateur, travailleurs sociaux, militants politiques et associatifs en milieu rural.
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«La journée du mardi se passa bien. La nuit, maman fit des cauchemars. "On me met dans une boîte", disait-elle à ma soeur. "Je suis là, mais je suis dans la boîte. Je suis moi, et ce n'est plus moi. Des hommes emportent la boîte !" Elle se débattait : "Ne les laisse pas m'emporter !" Longtemps Poupette a gardé la main posée sur son front : "Je te promets. Ils ne te mettront pas dans la boîte." Elle a réclamé un supplément d'Équanil. Sauvée enfin de ses visions, maman l'a interrogée : "Mais qu'est-ce que ça veut dire, cette boîte, ces hommes ? - Ce sont des souvenirs de ton opération ; des infirmiers t'emportent sur un brancard." Maman s'est endormie.»
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La mère, La Varienne, c'est l'idiote du village. La petite, c'est Luce. Quelque chose en elle s'est arrêté. Pourtant, à deux, elles forment un bloc d'amour. Invicible. L'école menace cette fusion. L'institutrice, Mademoiselle Solange, veut arracher l'enfant à l'ignorance, car le savoir est obligatoire. Mais peut-on franchir indemne le seuil de ce monde ? L'art de l'épure, quintessence d'émotion, tel est le secret des Demeurées. Jeanne Benameur, en dentellière, pose les mots avec une infinie pudeur et ceux-ci viennent se nouer dans la gorge.
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«Le haut plateau granitique du Limousin fut l'un des derniers refuges de l'éternité. Des êtres en petit nombre y répétaient le rôle immémorial que leur dictaient le sang, le sol et le rang. Puis le souffle du temps a touché ses hauteurs. Ce grand mouvement a emporté les personnages et changé le décor. On a tâché de fixer les dernières paroles, les gestes désormais perdus de ce monde enfui.»Pierre Bergounioux.
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Forêt, forêt de haute futaie, des arbres à abattre : tel est le cri du coeur (et le cri de guerre) que ne peut s'empêcher de pousser le comédien du Burgtheater au cours du dîner artistique donné en son honneur, à l'issue de la première du Canard sauvage, par les époux Auersberger, représentants on ne peut plus typiques de cette société artistique viennoise que l'auteur-narrateur abhorre et avec laquelle il se flatte d'avoir rompu une bonne fois pour toutes quelque trente ans auparavant.Forêt, forêt de haute futaie, des arbres à abattre : parole emblématique opposant à une réalité monstrueusement tangible de l'artifice social le rêve d'un état naturel révolu (et peut-être à réinventer), mais aussi formule magique susceptible de calmer la formidable irritation qui gagne le narrateur au contact renouvelé de cette épouvantable société artistique viennoise qu'il s'était juré de fuir à jamais et à laquelle il est bien forcé de constater qu'il n'a pas cessé d'appartenir.
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«"Papa m'a demandé de l'aider à en finir." Je me répète cette phrase, elle sonne bizarrement. Qu'est-ce qui ne colle pas? "Papa" et "en finir"?».
Avec Tout s'est bien passé, Emmanuèle Bernheim nous livre le récit haletant et bouleversant de son impensable aventure.
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«Quand le souffle passait en sifflant au-dessus de ma tête, c'était le vent dans les grands arbres de la forêt, et non la pluie. Quand il rasait le sol, c'était le vent dans les buissons et les hautes herbes, mais ce n'était pas la pluie. Quand il bruissait et chuintait à hauteur d'homme, c'était le vent dans les champs de maïs. Il possédait si bien les sonorités de la pluie que l'on se faisait abuser sans cesse, cependant, on l'écoutait avec un plaisir certain, comme si un spectacle tant attendu apparaissait enfin sur la scène. Et ce n'était toujours pas la pluie. Mais lorsque la terre répondait à l'unisson d'un rugissement profond, luxuriant et croissant, lorsque le monde entier chantait autour de moi dans toutes les directions, au-dessus et au-dessous de moi, alors c'était bien la pluie. C'était comme de retrouver la mer après en avoir été longtemps privé, comme l'étreinte d'un amant.» Le travail d'Alain Gnaedig, un des plus éminents traducteurs des langues scandinaves, mais aussi l'auteur d'une nouvelle traduction de Dickens, rend enfin tout son éclat à la prose de Karen Blixen, en proposant au lecteur français une traduction fidèle de l'original danois de La ferme africaine, un des titres les plus populaires de la littérature du XX?.
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«Celle qu'on aime, on la voit s'avancer toute nue. Elle est dans une robe claire, semblable à celles qui fleurissaient autrefois le dimanche sous le porche des églises, sur le parquet des bals. Et pourtant elle est nue - comme une étoile au point du jour. À vous voir, une clairière s'ouvrait dans mes yeux. À voir cette robe blanche, toute blanche comme du ciel bleu. Avec le regard simple, revient la force pure.»
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Ce livre n'est pas un roman. Ici, nulle place pour l'imagination. La zone d'une grande ville, des baraques, le terrain vague, les cris, les coups, la crasse, l'alcool, la sexualité, la brutalité et l'ignorance, la perversité, les jeux cruels des enfants désoeuvrés, tout est vrai. Vrai, aussi, le personnage du maître d'école, cherchant à leur donner le goût et l'ambition de la dignité humaine. «Je n'ignore point, dit l'auteur, que ces pages n'ont de valeur qu'en vertu de l'émotion qui, si toutefois j'y réussis, doit sourdre de cette succession de scènes, de faits, tous réels que j'ai dépeints.» Salué comme une révélation en 1952, Requiem des innocents est le premier livre de Louis Calaferte. Il garde aujourd'hui toute sa virulence et demeure un des grands cris de révolte contre la misère et l'injustice du monde moderne.
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Nouvelle édition en 2017
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Ce livre est le récit inoubliable des premières années d'Harry Crews. À la fois choquant, attendrissant et drôle, Des mules et des hommes raconte les débuts d'un écrivain dans un monde où « survivre est suffisant comme triomphe ».
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«Décembre est un mois où les hommes se saoulent - tuent, violent, se mettent en couple, reconnaissent des enfants qui ne sont pas les leurs, s'enfuient, gémissent, meurent...» "Oh..." raconte trente jours d'une vie sans répit, où les souvenirs, le sexe et la mort se court-circuitent à tout instant.
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«Maintenant, il savait tout le prix de Dorothy. Au fond de lui-même, il croyait qu'il avait gardé un pouvoir sur elle et qu'il pouvait la reprendre, si enfin il s'en donnait la peine. Et il ne pouvait pas croire que l'émoi qu'il ressentait ne fût pas communicatif. Elle avait l'air si bon, sur cette photo. Sa bouche répétait ce que disaient les yeux : une tendresse timide. Ses seins frêles disaient encore la même chose, et sa peau qui fuyait sous ses doigts, ses mains friables.»L'Adieu à Gonzague qui sert de conclusion au volume a été trouvé dans les archives de Pierre Drieu la Rochelle après sa mort. Le feu follet a été porté à l'écran par Louis Malle.
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«Tout m'avale... Je suis avalée par le fleuve trop grand, par le ciel trop haut, par les fleurs trop fragiles, par les papillons trop craintifs, par le visage trop beau de ma mère...Les enfants en mènent large. Ils peuvent dire pis qu'aimer, pis que pendre. Ils ont tous les droits. Entre vingt et vingt-trois ans (l'âge de ce roman), on a toutes les lois, toutes en même temps. Si on est doué, on les apprend. Si on est pas content, on se déprend, en se souvenant, en imaginant.»
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«Les barrages de la mère dans la plaine, c'était le grand malheur et la grande rigolade à la fois, ça dépendait des jours. C'était la grande rigolade du grand malheur. C'était terrible et c'était marrant. Ça dépendait de quel côté on se plaçait, du côté de la mer qui les avait fichus en l'air, ces barrages, d'un seul coup d'un seul, du côté des crabes qui en avaient fait des passoires, ou au contraire, du côté de ceux qui avaient mis six mois à les construire dans l'oubli total des méfaits pourtant certains de la mer et des crabes. Ce qui était étonnant c'était qu'ils avaient été deux cents à oublier ça en se mettant au travail.»
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Ce premier roman singulier commence avec la mort d'un mammouth à l'ère glaciaire et finit par une burlesque chasse au porc lors d'un enterrement dans le Midwest d'aujourd'hui. Entre-temps, on aura assisté à deux inondations, à quatorze bagarres, à trois incendies criminels, à une émeute dans une mairie, à une tornade dévastatrice et à l'invasion de méthodistes déchaînés ; on aura suivi la révolte d'une équipe d'éboueurs et vu comment un match de basket se transforme en cataclysme.
Tout se passe dans la petite ville de Baker, sinistre bourgade du Midwest ravagée par l'inceste, l'alcoolisme, la violence aveugle, le racisme et la bigoterie. Au centre des événements, John Kaltenbrunner, un enfant du pays, en butte à toutes les vexations, animé par une juste rancoeur. Comment John se vengera-t-il de la communauté qui l'a exclu ? Jusqu'où des années de désespoir silencieux peuvent-elles conduire un être en apparence raisonnable ?
Dans un style flamboyant, Le seigneur des porcheries retrace l'histoire de cette vengeance, telle qu'elle est contée, après la mort de John, par un des « humiliés et offensés » qu'il défendait.
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«Ça suffit d'être une vicieuse, une cachottière, une fille poisseuse et lourde vis-à-vis des copines de classe, légères, libres, pures de leur existence... Fallait encore que je me mette à mépriser mes parents. Tous les péchés, tous les vices. Personne ne pense mal de son père ou de sa mère. Il n'y a que moi.» Un roman âpre, pulpeux, celui d'une déchirure sociale, par l'autrice de La place.
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«J'ai voulu l'oublier cette fille. L'oublier vraiment, c'est-à-dire ne plus avoir envie d'écrire sur elle. Ne plus penser que je dois écrire sur elle, son désir, sa folie, son idiotie et son orgueil, sa faim et son sang tari. Je n'y suis jamais parvenue.» Annie Ernaux replonge dans l'été 1958, celui de sa première nuit avec un homme, à la colonie de S dans l'Orne. Nuit dont l'onde de choc s'est propagée violemment dans son corps et sur son existence durant deux années. S'appuyant sur des images indélébiles de sa mémoire, des photos et des lettres écrites à ses amies, elle interroge cette fille qu'elle a été dans un va-et-vient entre hier et aujourd'hui.
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«J'ai fait de ma fille un être de papier. J'ai tous les soirs transformé mon bureau en théâtre d'encre où se jouaient encore ses aventures inventées. Le point final est posé. J'ai rangé le livre avec les autres. Les mots ne sont plus d'aucun secours. Je fais ce rêve. Au matin, elle m'appelle de sa voix gaie au réveil. Je monte jusqu'à sa chambre. Elle est faible et souriante. Nous disons quelques mots ordinaires. Elle ne peut plus descendre seule l'escalier. Je la prends dans mes bras. Je soulève son corps infiniment léger. Sa main gauche s'accroche à mon épaule, elle glisse autour de moi son bras droit et dans le creux de mon cou je sens la présence tendre de sa tête nue. Me tenant à la rampe, la portant, je l'emmène avec moi. Et une fois encore, vers la vie, nous descendons les marches raides de l'escalier de bois rouge.»
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Noces de sang ; la maison de Bernarda Alba
Federico García Lorca
- Folio
- Folio
- 21 Avril 2006
- 9782070339068
Noces de sang Lorca s'inspire d'un fait divers relaté en juillet 1928. Mais c'est seulement en 1931 qu'il commencera à composer sa pièce. Il la termine au cours de l'été 1932. Créée le 8 mars 1933 à Madrid où elle remporte un grand succès, acclamée pendant des mois à Buenos Aires, elle a fait le tour du monde et malheureusement son triomphe a obscurci tout le reste de l'oeuvre de Lorca, en associant durablement pour la majorité son image à celle d'un auteur exclusivement andalou, folklorique. Non qu'elle manque de beauté : noble architecture, scènes admirables, mais elle trahit une excessive volonté de flatter le goût du public par sa frénésie déclamatoire et son lyrisme facile. La maison de Bernarda Alba Parti d'un souvenir d'enfance qui l'avait beaucoup impressionné, Lorca s'était proposé de composer un simple «documentaire photographique» sans «une goutte de poésie». Mais son génie en a décidé autrement. Il a fait de La maison de Bernarda Alba, comme l'affirme son frère don Francisco, peut-être la plus poétique de toutes ses pièces. En déplaçant l'action du début du XX? siècle à la veille de la guerre civile dont les premiers crépitements se font entendre, il instaure un climat brûlant de revendications, de troubles sociaux qui s'étend aux domestiques exploités, à toutes les femmes dominées. La prose incandescente brûle toutes les fleurs du lyrisme. Et la poésie dès lors se nomme révolte.
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«- Tu seras un héros, tu seras général, Gabriele D'Annunzio, Ambassadeur de France - tous ces voyous ne savent pas qui tu es ! Je crois que jamais un fils n'a haï sa mère autant que moi, à ce moment-là. Mais, alors que j'essayais de lui expliquer dans un murmure rageur qu'elle me compromettait irrémédiablement aux yeux de l'Armée de l'Air, et que je faisais un nouvel effort pour la pousser derrière le taxi, son visage prit une expression désemparée, ses lèvres se mirent à trembler, et j'entendis une fois de plus la formule intolérable, devenue depuis longtemps classique dans nos rapports : - Alors, tu as honte de ta vieille mère ?»
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Nouvelle édition en 2019