Chantre de la pensée de la Créolisation, de la Relation et du Tout-Monde, Édouard Glissant signe une oeuvre monumentale de romans-fresques, de poèmes épiques et d'essais philosophiques, poétiques et politiques. Il nomme tout cela poétrie, cet acte de pétrir la pâte de la langue et de l'imaginaire. Le numéro est dirigé par Valérie Loichot, professeur de lettres à Atlanta et ancienne élève d'Édouard Glissant à Baton Rouge. Le terme d'Entours contenu dans le titre renvoie aussi bien à l'écologie de l'auteur qu'à son entourage humain. De Martinique et de Guadeloupe, du Maroc et du Cameroun, de France, de Suisse et de Belgique, des Etats-Unis et de Grande-Bretagne s'élèvent des voix d'universitaires et de poètes qui rendent à Glissant un hommage digne de sa dimension-monde. Les quatre sections du recueil, « Relations », « Entours », « Politiques » et « Offrandes », évoquent tour à tour les affinités de l'oeuvre glissantienne à la philologie du Moyen-âge, l'anthropologie, le mouvement rastafari et l'écriture de la Shoah; les dimensions vertigineuses et tragiques de son paysage; les engagements et errances politiques de l'auteur des luttes pour l'indépendance à la commémoration de l'esclavage; et l'ami disparu dont le legs reste vivace.
Place forte de la pêche du hareng jusqu'en 1670, le port hollandais d'Enkhuizen connaît une restructuration économique profonde tout au long du XVIIIe siècle. L'effondrement démographique est spectaculaire, puisque la ville perd deux tiers de ses habitants entre 1622 et 1795.Connu depuis longtemps, le déclin d'Enkhuizen n'avait jamais fait l'objet d'une enquête sur son contenu et ses implications. L'ouvrage met en lumière un certain nombre de phénomènes comme l'émergence d'une société de l'entre soi ou la contraction de l'espace urbain utile. Repliée sur elle-même, la ville se déleste de ses pauvres tandis que le patriciat s'enrichit grâce au commerce asiatique. Cette société urbaine bouleversée se réinvente par le biais d'une mémoire civique commune, destinée à combattre le sentiment de déclassement. Cependant, les marqueurs identitaires mis en avant sont instrumentalisés par l'oligarchie locale, afin justifier son maintien au pouvoir.Cette relecture sociale et culturelle du déclin hollandais du XVIIIe siècle constitue une approche nouvelle, pour un objet d'histoire devenu classique. Enkhuizen connait davantage un déclassement et une restructuration, qu'un déclin absolu et irrémédiable. L'enquête, inédite, s'appuie sur le dépouillement approfondi d'archives aux Pays-Bas. Elle vise également, par le biais de la bibliographie, à mettre à la disposition du lecteur français des informations et des concepts jusqu'ici largement inaccessibles aux non-néerlandophones .
L'auteur des célèbres Chroniques de Narnia, ami de Tolkien, était-il misogyne ? Partant de cette question, ce livre explore la façon dont C. S. Lewis envisageait le masculin / féminin. Au premier abord, sa vision, inspirée des Anciens, semble très traditionnelle, hiérarchique et essentialiste. Toutefois, l'étude attentive de l'ensemble des écrits de Lewis révèle un auteur moins conservateur qu'il y paraît. En effet, son attachement au message résolument subversif du christianisme lui permit de concevoir le dépassement des valeurs traditionnelles d'une façon surprenante pour un homme de son milieu et de sa génération.
Dans les grandes religions monothéistes, de tendance patriarcale, les femmes se trouvent souvent reléguées au second rang. Historiquement, le christianisme a plutôt permis d'améliorer la position sociale de la femme, mais il a aussi contribué à en donner une image défavorable, celle d'une tentatrice, ou celle d'un être faible physiquement et moralement, plus prompt à se laisser séduire par le mal que l'homme. Rares sont les penseurs et théologiens chrétiens qui, au cours des siècles, ont cherché à réhabiliter la femme et ceux-là sont souvent tombés dans le piège inverse, consistant à l'idéaliser, qui ne lui permet pas davantage d'être elle-même. Il semble que ce soit une des grandes originalités de C. S. Lewis d'avoir su donner une place essentielle et valorisante au « féminin » dans le christianisme, car il est pour lui la voie qui mène à Dieu.
Ignore encore trop souvent que le poète romantique fût également philosophe. Lecteur passionné et subversif des grands penseurs de son temps (Kant, Fichte, Schelling, Reinhold, Jacobi, Schiller), Novalis se livre dans les Études fichtéennes (jamais parues de son vivant) à une interrogation de fond sur la philosophie transcendantale élaborée par ses maîtres, et en particulier par Kant et Fichte.
D'une extraordinaire puissance spéculative, d'une précocité inouïe (l'auteur est un jeune homme de vingt-trois ans), Novalis fait se succéder à une vitesse vertigineuse, dans ces carnets totalisant 667 fragments, autant d'intuitions fulgurantes, de mécompréhensions et de transformations conceptuelles délibérées qui restent toutes à interpréter. La question essentielle de ces pages se présente rapidement comme celle de la manifestation.
C'est plus précisément le thème de l'imagination, et par suite de l'image ou de l'apparence de l'être, c'est-à-dire de la perspective, qui se déplie nerveusement dans les fragments. Étroitement relié au problème du langage comme acte créateur, il apparaît dans le désordre, voire comme désordre. Car les méditations de Novalis ne suivent volontairement aucun protocole : pensées en acte à l'état pur, elles ne se soucient que de leur propre devenir, et tandis qu'elles affrontent jusqu'au non-sens, c'est à dessein qu'elles ne s'achèvent pas et qu'elles remettent en cause nos cadres de pensée hérités.
L'interrogation sur les instruments intellectuels de l'interprète est au coeur du présent volume.
Indépendamment d'une orientation théorique ou philosophique prédéfinie, il s'agit ici de présenter certains des concepts où s'articule la rationalité herméneutique.
- Allégorie - Compréhension - Connaissance - Contexte - Critique - Critique génétique - Déconstruction - Exégèse - Expliquer - Herméneutique - Histoire - Hypertexte - Interprétation - Lecture - Méthode - Mondes - New philology - Nihilisme - Pensée faible - Perspective - Philologie - Philosophie de la vie - Règles - Sens littéral - Sciences humaines - Signe - Signifiance - Structuralisme - Texte - Textualisme - Version - Aristote - Augustin - Barthes - Betti - Boeckh - Chladenius - Chomsky - Danto - Denys de Thrace - Derrida - Dilthey - Droysen - Eco - Erasme - Ferraris - Gadamer - Goodman - Luther - Misch - Nietzsche - Origène - Politien - Schlegel - Schleiermacher- Vattimo - Wolf - Wolff
Le chercheur du xxie siècle est soumis à des contraintes socio-économiques et politiques fortes.
Son identité professionnelle est caractérisée par la manière dont il peut résoudre la situation paradoxale dans laquelle il exerce, à savoir : un aspect collectif de la recherche marqué par le resserrement, la collaboration étroite entre secteurs, organismes de recherche dans le cadre de pôles d'excellence et un aspect individuel marqué par l'éclatement des statuts et la nécessité de compétences transversales nombreuses.
Cet ouvrage se propose de contribuer au débat d'idées autour des grands enjeux actuels du métier de chercheur et de la recherche : formation, professionnalisation, construction de compétences transversales, insertion professionnelle, relations public/privé, utilité et valorisation des résultats de recherche. l'intérêt de l'ouvrage est double. d'une part, après la présentation de l'évolution et des caractéristiques des contextes de la recherche en france, il met en évidence, à travers l'analyse de représentations, la construction identitaire des chercheurs.
Il montre également que la mise en oeuvre de leurs compétences disciplinaires et transversales s'inscrit dans une nécessaire collaboration entre les secteurs d'activité et qu'à côté des voies d'insertion dans les secteurs traditionnels de la recherche, grands organismes publics et de l'enseignement supérieur, organismes de recherche privée, il existe des activités nécessitant un haut niveau de formation, de compétences et d'expertise et à ce titre ouvertes aux chercheurs.
À l'heure où l'on s'inquiète de la place de la littérature française sur la scène internationale, cet ouvrage établit l'état actuel des recherches qui lui sont consacrées dans le monde.
Il présente les enseignements, travaux et publications, et met en évidence les particularités observables selon la diversité des zones géographiques, linguistiques et culturelles. Après la domination successive des écoles formalistes et structurales, puis de celles issues de la French Theory et de la déconstruction, aucune méthode ne semble aujourd'hui s'imposer, et la recherche, désormais plus syncrétique, préfère croiser des approches de nature diverse.
Quelques-uns des meilleurs spécialistes mondiaux montrent ainsi quels sont, depuis le basculement d'un siècle à l'autre, les écrivains et les esthétiques les plus étudiés, les méthodes critiques privilégiées et les relations qu'elles entretiennent avec les autres disciplines de la pensée.
Trente ans après le lancement de la politique de réformes et d'ouverture, le visage de la Chine a été profondément modifié. Cet ouvrage cherche à comprendre quelles ont été les évolutions structurelles du régime chinois tant le plan domestique qu'international. De quelle manière la politique chinoise a-t-elle évolué et quelle relation peut-on établir entre l'ouverture de la Chine au monde et sa politique intérieure?À travers les contributions inédites de chercheurs français, chinois et hongkongais, ce livre tente de présenter les évolutions structurelles du régime. La question du modèle de développement est également abordée. À bien des égards les choix retenus en Chine furent à la fois innovants et propres au cas chinois. Fiscalité, développement durable, accueil des capitaux étrangers, sur bien des points la Chine présente des solutions singulières. Car aujourd'hui, forte de son nouveau poids économique, la Chine est amenée à repenser son rôle sur la scène internationale. Elle fonde sa nouvelle puissance sur des outils innovants (clean tech, économie, influence culturelle). La dynamique à l'oeuvre en Chine pose donc la question du développement dans la mondialisation mais aussi des équilibres internationaux à venir. Assistons-nous à l'émergence d'une nouvelle superpuissance?
Rejetée du paysage intellectuel français depuis la Seconde Guerre mondiale, l'oeuvre de Maritain est une référence majeure dans la culture politique de la démocratie chrétienne d'Amérique du Sud. Une influence paradoxale, puisque Maritain s'est toujours défié des moyens impurs de la politique: philosophe chrétien de la démocratie au travers d'oeuvres comme Humanisme intégral ou Christianisme et démocratie, jamais il ne s'est voulu le philosophe de la démocratie chrétienne qu'il jugeait de manière sévère. Dans un premier temps, ce travail vise à analyser cette consommation politique du maritainisme, en déclinant dans la perspective d'une histoire comparée les différentes lectures qui ont été faites de Maritain par les élites catholiques sud-américaines, des années 20 à la charnière des années 60 et 70. Il s'agit notamment de montrer comment l'oeuvre du philosophe a rencontré l'horizon d'attente d'une génération de jeunes catholiques soucieux d'inventer de nouvelles formes d'engagement du chrétien dans la vie de la cité. Par ailleurs, parce que la réception du maritainisme outre-Atlantique est particulièrement polémique et suscite de nombreux débats, elle constitue un prisme utile pour décrire les lignes de faille qui parcourent le catholicisme sud-américain durant près d'un demi-siècle. Du renouveau catholique de l'Entre-deux-guerres jusqu'aux mutations post-conciliaires, le maritainisme ne cesse d'être une question disputée, qui témoigne du regard que portent les élites catholiques, dans leur diversité, sur la place de l'Église dans le monde moderne.
Partant d'un questionnement sur le respect, en tant que principe de l'éducation, le livre aborde une succession de thèmes qui forment système.
Sont ainsi approchés et articulés entre eux des sujets tels que la connaissance, l'idéologie, la perception, l'intelligence et l'éthique. Le dernier chapitre traite de la formation fondamentale. En quoi la question du rapport au réel peut-elle être fondamentale pour l'éducateur ? est la question qui mobilise ce travail, principalement axé sur l'étroite relation qui unit la connaissance et la valeur.
L'étude sonde l'articulation épistémologie/éthique, analyse et relie ces deux sphères. Interroger le rapport au réel, c'est contribuer à mieux comprendre le rapport à l'Autre. Autrui s'inscrit dans ce réel que j'appréhende, et auquel je donne sens et valeur. Le respect est une forme particulière d'un rapport au monde englobant comme tout rapport au réel connaissance, perception, interprétation. Interroger le rapport au réel, c'est donc aussi interroger des fondements, ou même des conditions de possibilité du rapport à l'Autre, ainsi que de l'attitude éthique.
Le rapport au réel est notamment sous-tendu par l'esprit critique, sens de la Valeur et expression de l'intelligence, qui irradie tout champ du réel. Chez l'homme considéré comme un tout, comme un " système perceptif interprétatif ", intellect et morale ne sont pas disjoints, si la même source compréhensive est à l'oeuvre, et compte tenu de l'unité de l'esprit. Cette perspective holiste va à l'encontre des conceptions qui défendent une disjonction radicale entre le Vrai et le Bien, positions à vrai dire suspectes d'anesthésier l'esprit critique et de favoriser l'idéologie.
On accorde trop peu d'importance à l'étude des formes à l'oeuvre dans le discours philosophique. Pourtant l'élaboration des doctrines n'est pas indépendante des genres textuels qui leur offrent un cadre d'exposition. Ce volume, qui réunit les contributions de philosophes et de spécialistes d'analyse du discours, se propose d'introduire à l'étude du dialogue, genre omniprésent dans l'histoire de la philosophie. Les chapitres consacrés à un problème de méthode (comment sont-ils construits, comment les analyser ?), à une oeuvre (Platon, Galilée, Descartes, Leibniz, Hume, Shaftesbury, Diderot), à une période (la Renaissance, le libertinage érudit au XVIIe siècle), permettront de s'interroger sur le degré de nécessité qui lie son adoption aux thèses et thèmes qu'il permet de traiter.