Marianne Alphant
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Lire les Pensées de Pascal, c'est faire l'expérience d'un désordre dont nous sommes inconsolables. Depuis le déchiffrement des papiers laissés par l'auteur et les embellissements de la première édition, jusqu'aux plus récentes tentatives d'organiser ces fragments, on a choisi de redonner ici les étapes d'une lecture aventureuse. C'est la vie même de Pascal, énigmatique elle aussi, qui apparaît alors par bribes au fil de la lecture : anecdotes, objets, lettres, rares témoignages. Dans ce fouillis prodigieux, le lecteur des Pensées reconnaît son propre trouble.
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Au fond, qu'est-ce qui vous intéresse en lui ? Sa mort ? Vous perdez votre temps, il ne reste rien, c'est poussiéreux. Tâchez de simplifier pour aller vite.
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Des écrivains à la bibliothèque de la Sorbonne Tome 1
Arlette Farge, Eugène Durif, Pierre Bergounioux
- Editions De La Sorbonne
- 20 Septembre 2018
- 9791035100841
Quatre écrivains, trente-quatre kilomètres linéaires de collections - une règle du jeu : ne choisir qu'un livre pour une rencontre avec la Bibliothèque interuniversitaire de la Sorbonne.
Car, quand la Maison des écrivains et de la littérature invite Pierre Bergounioux, Marianne Alphant, Arlette Farge et Eugène Durif à poser un regard intime et curieux sur la BIS, cela donne quatre inédits, quatre chemins dans le labyrinthe de ces collections d'excellence, dans les méandres de cette bibliothèque singulière et attachante, quatre voix narrant une histoire de traces et d'effacements, sorte d'archéologie intime révélant la richesse de ce fonds.
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Petite nuit évoque ces images arrêtées où l'on se revoit en train de lire - à genoux sur le tapis d'un salon, allongée dans l'herbe, réfugiée dans une embra sure avec, selon les cas et les époques, L'Auberge de l'Ange-Gardien, La Guerre du feu ou La Légende de saint Julien l'Hospitalier. Scènes comme hors du temps, fondatrices, sans qu'on sache au juste pourqu oi cette page, ce moment, cette lumière, cette position, ont ainsi résisté à l'oubli, aussi tenaces et inexplicables que des souvenirs-écrans.
Évoquer ces images, revivre ces moments de lecture comme des rêves ou des symptômes, c'est revenir à ce divan de l'analyse où la lectrice a tenté de comprendre qui elle était, d'où elle venait& nbsp;: de quelle histoire, de quelle généalogie mais aussi de quels livres - fille ou sOEur de quels héros, élevée par quels auteurs, s'exprimant dans quelle langue apprise de la comtesse de Ségu r, de Péguy ou de Victor Hugo. Quitte à mélanger sans fin les figures de cette addiction, Stendhal racontant Waterloo à une petite fille, une séance de tables tournantes chez Victor Hugo, Dostoïevski réclam ant des livres à son frère, Freud montrant sa collection d'antiques, une soirée de poésie chez Madame Récamier, Madeleine Blanchet traversant la rivière en portant le champi, Gwynplaine découvrant un b&ea cute;b&eac On l'a compris ce livre est un livre sur l'amour de la lecture, sur la manière dont on peut y engager sa vie à tout jamais et sur le reflet de nous-mêmes que nous tendent les livres, sur notre énigme telle qu'ils la dessin ent. C'est aussi, en relation constante avec les livres, les histoires et les personnages qui les peuplent, la chronique discrète, à travers l'analyse, d'une recherche et d'une interrogation personnelles.
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Trois femmes dans une chambre autour d'un mourant. Trois parties dans ce livre autour d'un texte ou de ce résidu qu'il laisse quand la voix, intérieure ou haute, l'attention, la distraction le couvrent et le découvrent : bribes ou ossements, relique. Au commencement, la lecture se souvient de son apprentissage, vigilante, appliquée. À mesure qu'elle avance, les signes du livre se mêlent à ceux du monde, la promenade est amoureuse. Au terme de l'histoire l'expédition qui fouille un champ de ruines s'efforce de mettre à jour ce qui est enterré, l'essentiel ou presque rien, plusieurs fois perdu et retrouvé. Tel ce Bois planté sur la tombe d'Adam, puis coupé, rejeté, reconnu, déplacé. Plus tard enseveli, inventé, volé, restitué, comme le rapporte la légende de la Croix.
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Jude Stéfan ; une vie d'ombre(s)
Marie-françoise Lemonnier-delpy
- Academia
- 3 Septembre 2012
- 9782806100658
L'ouvrage réunit des entretiens avec et sur Jude Stéfan, une suite d'hommages très variés de ses ami-e-s écrivains et artistes d'aujourd'hui et un cahier central de photographies de l'exposition qui lui a été consacrée en 2010. Il comporte des inédits exceptionnels de Jude Stéfan : "Sur le « coup de foudre » littéraire", "Carnets d'un Anti-musicien" et "Abrégé d'utopie (essais)" et "Les Voix", seule pièce de théâtre qu'il ait écrite.
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Réflexions issues d'un colloque sur l'historicité de l'art moderne qui a eu lieu au Centre Pompidou du 21 au 22 mai 2004.
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- Claude Monet, le plus connu, le plus aimé de tous les peintres, il semble au lecteur, à la fin de ce livre, qu'il ne le connaissait pas. Les débuts difficiles, le travail sur les motifs, les séries, le vieillard à la barbe blanche, le jardin de Giverny - on retrouvera tout cela ici, certes, mais forcé lumineusement au-delà du cliché, le long de 34 chapitres qui s'enchaînent comme autant de stances d'une expérience unique et bouleversante.
Fruit d'un long travail de reconstruction, le livre suit le peintre pas à pas et parfois heure par heure, mais jamais ici la biographie n'a la distance équivoque d'un récit linéaire rétablissant les faits après coup : elle épouse les errements et les embardées de la vie, elle avance auprès du peintre dans ce paysage qu'il finira par trouer, basculant presque malgré lui au-delà du motif. Que le texte évoque "l'extraordinaire volonté qu'à Monet de maintenir l'informe", qu'il retrace avec une minutie exemplaire le caractère épique des "campagnes de peintures" ou qu'il s'ouvre fraternellement à l'éternelle satisfaction d'un artiste bien conscient de chercher l'impossible, ce qui le conduit et l'éclaire, c'est avant tout le travail secret de l'oeuvre, son mouvement anxieux, son tourment. Ainsi est-ce un Monet perpétuellement tendu - tous le contraire de la facilité et des bonheurs qu'on imagine - qui traverse ces pages. De Boudin à Jongkind, de Manet à Pissarro, de Renoir à Cézanne à Whistler ou Sargent, mais aussi des proches des marchands, de Mirbeau à Mallarmé, de Zola à Clémenceau, le livre fait bien sûr défiler tous ceux qui ont joué un rôle dans la vie de Monet. Témoins, ils ne sont là pourtant que pour éclairer d'un certain jour l'aventure au fond si solitaire du peintre des Cathédrales, des Meules ou des Nymphéas. Roman de formation, mais d'une formation sans fin recommencée où, de crise en crise, l'expérience ricoche, trébuche et s'exalte, ce livre donne accès à l'égarement même du procès créatif - et dans une proximité telle que, le temps d'une lecture, le lecteur pourra se redire ce que se disait Mallarmé : "Une chose dont je suis heureux, c'est de vivre à la même époque que Monet". -
Ce devait être un livre sur la légèreté, entrelaçant des figures dix-huitièmes : grâce et caprice, enchantement, libertinage, fêtes galantes, parcs et folies ; bonheur aussi, cette idée neuve. Mais l'exaltation d'un siècle aérien est sans cesse menacée par le retour d'un dix-huitième plus noir et plus terrible. Le siècle est trouble, il faut choisir, mais la narratrice hésite, tour à tour tentée par le frivole et par l'héroïque. La vie de Casanova ou celle de Robespierre ? Un lit de Fragonard ou des scènes d'échafaud ? L'herbier de Rousseau ou l'exhumation des tombeaux de Saint-Denis ?
Watteau, Crébillon, Sade, Mesmer. Le parc d'Ermenonville et la prison du Temple. Tiepolo, Marivaux, Chardin, Danton. La narratrice entre dans le dix-huitième, il se diffuse en elle comme une drogue ou un poison ? chaud, inouï, parfois terrible mais, l'époque le veut, toujours sensible.
Impossible surtout d'aborder le dix-huitième et ses contradictions, sans avoir affaire à l'Histoire ? une Histoire qui n'aime pas qu'on vienne en amateur sur son terrain. La narratrice n'est pas à la hauteur : elle bifurque, elle flotte, elle ne s'intéresse qu'à des détails, l'Histoire s'impatiente et le lui fait sentir.
Le récit, la chronologie, les détails: autant d'occasions de conflit entre l'Histoire et son apprentie, cette narratrice égarée parmi les petits faits, les pompons, la porcelaine, les souvenirs qui lui reviennent d'un dix-huitième qu'elle n'a pas connu mais qui l'accompagne comme le secret d'une vie.
Ce n'est pas un livre léger, finalement ? il court après l'époque, s'accroche à des détails, ne ressemble à rien. Sinon à l'esprit même, à sa pensée volante, fragile, somnolente, tenace, livrée sans résistance à de très anciens affects.
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Evocation de Samuel Beckett par des écrivains français et étrangers, qui proposent un texte autour d'un lieu, d'un objet ou d'une matière, représentatif de son oeuvre.