Ses carnets rouges, Rama Yade les a soigneusement conservés. Depuis le premier jour de son engagement politique, en 2006, elle y a tout transcrit, tout raconté, tout décrit : son itinéraire exceptionnel de jeune femme arrivée au sommet de l'État, avec la conquête du pouvoir par la « génération Sarkozy », ses transgressions et ses ruptures. Mais aussi l'épreuve des renoncements, sous la pression de la crise et surtout du Front national.
Au coeur de ce gouvernement soumis à rude épreuve, Rama Yade tente de préserver l'idéalisme républicain de ses débuts. Ne se résolvant pas à voir la droite absorbée par une extrême droite qui, selon elle, n'a jamais changé, elle se bat pour défendre une alternative moderne, absolument républicaine, ouverte sur le monde, qu'elle tente d'incarner, quitte à surprendre par des changements soudains dans ses engagements publics.
Rama Yade a parcouru la France à la rencontre des professeurs et des élèves. Elle en rapporte une réflexion sur une Education nationale, de moins en moins éducative et de moins en moins nationale. Se livrant elle-même à travers sa propre formation scolaire, elle estime que la source profonde du mal éducatif français réside dans le renoncement assumé à toute instruction publique, à l'origine d'une génération diplômée mais illettrée et donc précarisée sur le marché du travail.
Pour elle, l'école républicaine ne saurait être démocratique et hypocritement axée sur le plaisir de l'enfant sans en saper les fondements, c'est-à-dire l'autorité et l'excellence. Et quand l'école faillit à sa mission, seuls les puissants, désireux d'échapper à la médiocrité générale, survivent. Parsemé de formules frappantes (l'école s'est vue assigner un objectif utilitariste, la discrimination positive pour solde de tout compte...), aussi excitant pour l'esprit que provoquant envers les vieux dogmes usés, Plaidoyer pour une instruction publique dépasse le constat amer comme les clivages politiques pour en appeler à une école républicaine, celle de l'exigence et de la transmission des savoirs.