Résumé

À la croisée de l'architecture, de l'esthétique et des sciences de l'ingénieur, ce livre vise à éclaircir l'impensé du retour d'un art décoratif utilitaire dans la lutte contre le réchauffement climatique, et à constituer un catalogue encyclopédique d'éléments décoratifs aux typologies anciennes (tapis, tapisseries, rideaux, miroirs etc. actualisés selon les connaissances scientifiques d'aujourd'hui : effusivité thermique, d'émissivité, de conduction, de réflectance, etc.).

Jusqu'au début du XXe siècle, la décoration d'intérieur en Occident avait un rôle pratique : celui de lutter contre le froid, d'amplifier la lumière ou de bloquer les courants d'air froid. Un tapis servait à ne pas avoir froid aux pieds, une tapisserie à isoler thermiquement les murs ; les cristaux des lustres, comme les miroirs ou les dorures, étaient là pour démultiplier le faible éclairage solitaire des bougies et des petites fenêtres ; un paravent servait à « parer le vent », les rideaux à bloquer les courants d'air. Bien plus efficaces dans ces fonctions climatiques, l'arrivée au tournant du XXe siècle du chauffage central, de l'air conditionné et de l'éclairage électrique, grâce à un usage massif d'énergies fossiles, a rendu caduc cette raison d'être utilitaire et climatique première de l'art décoratif d'intérieur. On a dès lors pu décrocher ces anciens dispositifs décoratifs au profit d'intérieurs épurés, minimalistes, vides et blancs, ceux caractéristiques de la modernité du XXe siècle - une esthétique sous-tendue par le dégagement de CO2 des chaudières à fioul et des centrales à charbon.

Aujourd'hui, avec la nécessité de réduire l'empreinte carbone des bâtiments, mais aussi la lutte contre les canicules, apparaissent de nouvelles exigences thermiques et de réduction énergétiques qui demandent par exemple d'isoler les murs avec 20 cm d'isolation thermique. On peut se demander si cette isolation thermique n'est pas en réalité une nouvelle forme de tapisserie qui ne dit pas son nom, et marquerait inconsciemment un retour de la décoration d'intérieur. Si le style moderne du XXe siècle était la conséquence des énergies carbonées, gaspillant sans limite les ressources et l'énergie pour se chauffer et s'éclairer, la décarbonisation du bâtiment est en train d'induire, sans que l'on s'en rende compte, un nouveau style décoratif propre au XXIe siècle où la performance thermique, l'empreinte carbone et l'écologie redéfinissent les choix formels, matériels, et finalement les valeurs esthétiques, culturelles et sociales des intérieurs.

Pour la discipline de l'architecture d'intérieur, l'enjeu est de réactiver le sens pratique de l'art décoratif d'intérieur tel qu'il existait avant le XXe et de dépasser son caractère apparemment futile pour inventer de nouveaux modes d'aménagement intérieur, de nouvelles configurations spatiales, formelles, et matérielles, à disposition des décorateurs et des architectes d'intérieur : une esthétique décorative propre au XXIe siècle, que nous proposons d'appeler « style anthropocène ».


Rayons : Arts et spectacles > Généralités sur l'art > Essais / Réflexions / Ecrits sur l'art


  • Auteur(s)

    Philippe Rahm

  • Éditeur

    Head Publishing

  • Distributeur

    Serendip

  • Date de parution

    03/03/2023

  • Collection

    Manifestes

  • EAN

    9782940510771

  • Disponibilité

    Disponible

  • Nombre de pages

    80 Pages

  • Longueur

    17 cm

  • Largeur

    10.5 cm

  • Poids

    106 g

  • Diffuseur

    Serendip

  • Support principal

    Grand format

Infos supplémentaires : Broché  

Philippe Rahm

  • Naissance : 1-1-1967
  • Age : 58 ans
  • Pays : Suisse
  • Langue : Francais

Docteur en architecture (Paris-Saclay), il a fondé l'agence Philippe
Rahm architectes en 2008 à Paris. Son travail a acquis une audience internationale dans le contexte du développement durable. Il notamment remporté le concours de l'aménagement de l'Agora de La Maison de la Radio à Paris. En 2019, avec OMA, il est lauréat du projet de réaménagement urbain du quartier de Farini de 62 hectares à Milan en Italie. Il a enseigné à Princeton, Harvard et Columbia University et Cornell, a été invité, entre autres à la Biennale Venise en 2002 et 2008 et à celle de Sharjah en 2019.
Ses livres les plus récents sont Le jardin météorologique paru aux Éditions B2 en 2019, et en 2020, Écrits climatiques chez B2, Météorologie des sentiments aux Éditions Les Petits Matins ainsi que Histoire naturelle de l'architecture aux Éditions du Pavillon de l'Arsenal.

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